Wittgenstein et les limites du langage (2004)


“Wittgenstein et les limites du langage”

Pierre Hadot

-Abrégé résumé par César Valentine-




(Abrégé résumé du livre de Pierre Hadot, ainsi que quelques synthèses de la pensée de Witgenstein)

 

 

“Les limites de mon langage signifient les limites de mon monde” (tractatus 5.6)

Le tractatus ne veut pas délimiter le domaine du vrai, mais le domaine du sensé.

 

Théologie négative :

Méthode rationnelle consistant à démontrer que le principe de toutes choses ne peut être aucune des choses, et ne peut être défini que par négation de tous les prédicats possibles. Ce qui équivaut à l’impossibilité de penser le principe de manière rationnelle. Il n’y a donc pas de connaissance rationnelle, mais il y a possibilité d'un mode de connaissance de l'ordre de l'expérience supra-rationnelle.

Cependant, la théologie négative, de par sa nature même, n'est pas en mesure de procurer cette expérience.

 

Mystique et indicible :

Sentiment, émotion, expérience affective que l'on ne peut exprimer, parce qu'il s'agit de quelque chose d'étranger à la description scientifique des faits, quelque chose qui se situe alors dans l'ordre existentiel, ou éthique ou esthétique.

Quand je fais cette expérience, “je m'étonne de l'existence du monde”.

 

“Le sentiment du monde en tant que totalité limitée constitue le sentiment mystique”

 

Le sujet métaphysique (qui n'est ni l'homme, ni le corps humain, ni l'âme humaine) est la limite du monde et non un objet dans le monde.

On trouve une possible définition du “sujet métaphysique” par Schopenhauer : “On ne considère plus, ni le lieu, ni le temps, ni le pourquoi, ni l’à-quoi-bon des choses, mais purement et simplement leur nature”.

Le “sujet métaphysique” comme “sujet pur” qui s'abîme et se perd dans l'objet. Le sujet métaphysique est dans l’Intuition désintéressée du monde.

 

“L'esprit est éternel dans la mesure où il conçoit les choses dans la perspective de l'éternité” (Spinoza)

 

Pour Schopenhauer, celui qui voit les choses dans cette perspective dépasse son individualité et s'identifie au sujet éternel de la connaissance.

Mais éternité ne doit pas être entendu comme durée temporelle infinie, mais comme intemporalité : “Celui-là vit éternellement qui vit dans le présent” (Wittgenstein).

 

“La tendance vers le mystique vient que la science laisse nos  désirs insatisfaits. Nous sentons que, lors même que toutes les questions scientifiques sont résolues, notre problème n'est pas encore abordé” (Wittgenstein)

 

Nous pouvons comprendre des propositions métaphysiques (éthiques) dénuées de sens puisque ne correspondant pas à des rapports entre des objets déterminés contenus dans le monde, car le langage n'a pas pour unique fonction de désigner des objets ou de traduire des pensées, et l'acte de comprendre une phrase est beaucoup plus proche que l'on ne croit, de ce que l'on appelle habituellement comprendre un thème musical.

Les propositions éthiques montrent un indicible. Cet indicible est la limite de notre monde et de notre langage : “je”, “la mort”, “la totalité du monde”... Cette intuition est liée au sentiment.

 

Dire que le premier principe (dieu) est inconnaissable implique qu'il y a des limites insurmontables du langage humain.

Le discours rationnel donne :

  • Un principe de tout ce qui est
  • La notion de principe premier qui est la limite infranchissable imposée au discours

 

Ainsi :

  • Où nous pouvons parler du principe = il n'est plus le principe
  • Où nous ne pouvons pas parler du principe = il n'est plus rien pour nous

 

La solution des problèmes philosophiques, c'est de montrer que ces problèmes proviennent d'une incompréhension de la logique de notre langage.

Le terrain abandonné par la philosophie peut être occupé par la “vie” et la mystique.

 

Le langage philosophique engendre des pseudos problèmes.

“Mon livre traite des problèmes philosophiques et montre que la position des problèmes philosophiques repose sur une mauvaise compréhension de la logique de notre langage. On pourrait résumer tout le sens du livre en disant “Ce qui peut se dire, peut se dire clairement, et au sujet de ce dont on ne peut parler, on doit se taire”. Le livre présent veux donc tracer une limite pour la pensée, ou plutôt non pas à la pensée, mais est l'expression de nos pensées. Car, pour tracer une limite à la pensée, nous devrions pouvoir penser les deux côtés de cette limite, c’est-à-dire penser ce qui ne peut se penser. La frontière ne pourra donc qu'être tracée dans le langage, et ce qui se trouve au-delà de cette frontière sera purement et simplement non-sens”.



Forme logique :
Nous formons une image de la réalité par la pensée.
Pour que l'image soit son modèle, il faut qu'elle ait la même structure que lui.
Donc pour que la pensée soit la réalité, il faut que la pensée ait la même structure que la réalité. C’est-à-dire que les éléments qui composent la proposition soient ensembles dans la même relation que les éléments de la réalité.
Cette identité de structure, c’est la “forme logique”.

 

Une image peut représenter véritablement ou inexactement :

  • Si elle représente quelque chose, elle a un sens possible
  • Si elle ne représente rien, elle n'a pas de sens

Pour représenter, l'image doit avoir une certaine communauté de forme avec la réalité.

Une forme logique correspond à un fait possible. Un fait est possible que s’il a la forme d'un fait réel. Il n'y a de faits réels vérifiables que les faits d'ordres physiques.

 

Une proposition a du sens si elle a une structure semblable à celle d'un fait atomique.

 

Les propositions philosophiques n'ont pas de forme logique, car elles comportent des éléments dont la signification exacte ne peut être déterminée. Elles n’ont donc pas la structure d'un fait possible.

Mais du coup, les propositions du tractatus logico-philosophicus tombent sous ce même reproche, elles ne se rapportent pas à des faits atomiques.

 

Wittgenstein prévient lui-même :

“Mes propositions sont clarificatrices en ce que, quiconque me comprend, les reconnaît à la fin pour des non-sens, lorsqu'il a sauté au travers elles, sur elles, au-delà d'elles” (6.54)

 

Cependant il y a une distinction importante chez Wittgenstein. Distinction entre “dire” et “montrer” :

  • Dire = représenter un fait objectif
  • Montrer = manifester quelque chose d'irreprésentable.

 

La forme logique n'est ni un fait, ni un objet. Elle ne peut pas être exprimée par une proposition ou un nom.

Elle est en mode de rapport. Elle se montre dans la manière dont la proposition est articulée.

“La proposition ne peut représenter la forme logique, mais la forme logique se reflète en elle. Ce qui se reflète dans le langage, le langage ne peut l'exprimer” (4.121).

La logique des faits ne peut se représenter.

Les signes “et” ou “implique” ne représentent pas une réalité du monde objectif.

“Ce qui peut être montré, ne peut être dit” (4.1212).

 

Une proposition “dit” et a donc un sens quand elle représente un fait. Mais en disant, elle montre sa forme logique, c'est-à-dire qu'elle montre son identité de structure avec la réalité.

 

L'expressivité du langage est inexprimable :

“Ce qui s'exprime dans le langage, nous ne pouvons l'exprimer par le langage” (4.121)

 

Donc, le langage cesse d'avoir un sens lorsqu'il veut s'exprimer lui-même comme langage.

Le langage ne peut se dire lui-même, il est à lui-même sa propre limite. Et c'est à cette propre limite que se heurte le langage philosophique.

 

Donc les propositions philosophiques sont des non-sens pour deux raisons :

  1. Impossibilité d'y relier un fait empirique
  2. Caractère insurmontable du langage

(Le langage est ce qui constitue le sens)

 

Résoudre le problème du caractère insurmontable du langage par la construction d'un métalangage, oblige à imaginer une série infinie de métalangage, et est donc impossible à réaliser.

Le langage est le fait fondamental de la philosophie. Ainsi la philosophie est constituée de propositions qui sont des non-sens.

 

Donc pour Wittgenstein : “le but de la philosophie est la clarification des pensées. La philosophie n'est pas un enseignement, mais une activité. Une œuvre philosophique consiste donc essentiellement en élucidations. Le résultat de la philosophie ce ne sont pas des propositions philosophiques, mais la clarification des propositions. La philosophie doit rendre claires et délimiter avec précision les pensées, qui autrement seraient troubles et confuses” (4.112)

 

Si Wittgenstein énonce lui aussi des propositions qui sont des non-sens, c'est que pour lui, le langage ne se limite pas à dire le représentable.

 

4 usages du langage :

  1. Usage représentatif ou sensé
    Propositions qui ont une forme logique

  2. Usage tautologique ou analytique
    Propositions logiques elles-mêmes
    “Les propositions de la logique ne disent rien elles sont des propositions analytiques”, elles sont privées de contenu de connaissance

  3. Usage non-sensé
    Engendre des pseudos propositions = la plupart des propositions philosophiques

  4. Usage indicatif
    Usage légitime. Les vraies propositions montrent quelque chose qui ne peut s'exprimer

 

Pour cela, on est obligé d'admettre un langage logiquement incorrect, obligé d'utiliser le langage d'une manière non représentative.

Ce qui compte ce n'est pas ce que le langage nous dit, c'est ce qu’il nous permet de viser.

Ainsi le langage incorrect peu à la fois être dépourvu de sens logique et nous montrer l'inexprimable.

“Les limites de mon langage signifient les limites de mon monde” (5.6)

Je suis moi-même une limite de ce langage et une limite du monde : “le sujet n'appartient pas au monde, mais il est une limite du monde” (5.632), comme l'œil a un champ visuel, mais est lui-même la limite de ce champ visuel.

“Il y a donc réellement un sens dans lequel on peut parler, en philosophie, du moi, d'une manière non psychologique. Le moi entre en philosophie par le fait que le monde est mon monde. Le moi philosophique n'est pas l'homme, non pas le corps humain, ou l'âme humaine dont traite la psychologie, mais le sujet métaphysique, la limite, non pas une partie du monde” (5.64)

 

“Aucune partie de notre expérience n’est à priori. Tout ce que nous voyons pourrait être autrement. Il n'y a pas d'ordre des choses a priori” (5.634)

 

“Le sens du monde se trouve en dehors de lui. Dans le monde, toutes choses sont comme elles sont et arrivent comme elles arrivent. Dans le monde, il n'y a aucune valeur. S’il y a de la valeur qui ait vraiment de la valeur, elle doit se trouver en dehors de tout événement et de tout être-de-telle-manière. Car tout événement est accidentel. Ce qui le rend non-accidentel, ne doit pas se trouver dans le monde, car autrement, cela à nouveau serait accidentel” (6.41)

Donc toute éthique est transcendantale, c'est-à-dire non empirique. Cette source des valeurs peut-être le “Je” ou “Dieu”.

 

A la fin du traité, Wittgenstein formule des propositions qui appartiennent au 4e genre d'usage du langage. Elles cherchent à montrer l'inexprimable au travers de leur incorrection.

“En les transcendant, on a la juste vision du monde”. Cela provoque en nous le sentiment mystique.

La mystique est le sentiment qui nous saisit quand nous nous heurtons aux limites de notre langage et de notre monde et que nous présentons un “inexprimable”.

Le Mystique commence en nous au moment où l'usage indicatif du langage provoque en nous un sentiment de limitation ou de totalité.

C'est l'extase de Roquentin dans le jardin de Bouville (Sartre).

 

Les trois composantes du “mystique”

  1. Le sentiment de l'existence
  2. Le sentiment du tout limité
  3. Le sentiment de l'inexprimable, c’est-à-dire un au-delà du langage

Le sentiment mystique est donc l’impossibilité de donner, de l'intérieur du monde et du langage, un sens au monde, à son existence, et à sa totalité.

 

Wittgenstein lisait beaucoup “le pèlerin chérubinique” d’Angelus Silesius : “On parle en se taisant : Homme si tu veux exprimer l’être de l'éternité, il faut d'abord te priver de toute paroles”. Cette phrase d’Angelus Silesius est proche de cette phrase de Wittgenstein : “De ce dont on ne peut parler, on doit se taire”. On retrouve une sentence similaire aussi chez Platon dans la lettre VII : “Je n'ai jamais rien écrit sur ce qui est l'objet de mon effort”.

Il y a un ineffable : je peux viser quelque chose qui transcende les limites du monde.

 

Si je ne peux penser que ce qui a une forme logique, je ne peux pas penser la forme logique elle-même. Pour la penser il me faudrait sortir du langage et du monde. Donc tout le “penser” ne se réduit pas au “dire”.

Je ne peux pas “dire” la forme logique, mais je peux la viser.

Je ne peux pas “dire” mon langage, je peux seulement le viser.

En somme, le langage lui-même nous ouvre la notion d'ineffable.

C'est parce que je veux parler exactement et logiquement que je suis obligé d'accepter d'employer un langage inexact logiquement.

La forme la plus fondamentale du langage pourrait être la poésie, qui fait naître le monde devant moi.

Tout le langage tend inéluctablement à devenir philosophique, autrement dit, tout langage cherche à s'exprimer comme langage, à exprimer sa propre expressivité. La philosophie découvre sa propre impossibilité, c’est-à-dire se heurte aux limites du langage.

 

Ineffable : Qu’on ne peut exprimer par des mots en raison de son intensité ou de sa nature. Un ineffable bonheur, c’est-à-dire un bonheur indescriptible.

 

“Il pleut ou il ne pleut pas” = proposition logique vraie. Elle est vraie mais elle n'a pas de sens, elle ne dit rien, elle n'affirme pas la possibilité d'un état de choses. Cependant, même dépourvue de sens, elle n'est pas un non-sens comme l’est la proposition philosophique. Elle est non représentative, mais ne prétend pas représenter l'irreprésentable comme le prétend la proposition philosophique.

Cependant, “la philosophie signifiera l'indicible, en présentant clairement le dicible” (4.115)

Et si on peut viser sans l’exprimer cet inexprimable, c’est bien qu’il se montre.

“Ce qui s'exprime dans le langage, nous ne pouvons exprimer par le langage” (4.121)

C'est une illusion de chercher la profondeur et l'émerveillement loin du langage quotidien.

 

On pourrait lui objecter : “Mais en quoi votre recherche peut-elle prendre de l'importance, puisqu'elle démolit tout ce qui est intéressant et important ?”

Wittgenstein répond : “Ce ne sont que des châteaux de cartes que nous détruisons, et nous mettons à l'air libre le fond du langage sur lequel ils avaient été élevés” (§118)

 

C'est ce qui est le plus simple et le plus familier qui doit nous émerveiller.

“Les aspects des choses qui pour nous sont les plus importants nous sont cachés parce qu'ils sont simples et “quotidiens”. Les fondements authentiques de sa recherche n'étonnent pas l'homme. Seulement, cela, une seule fois, l’a étonné. Cela veut dire : ce qui, une fois reconnu, est le plus étonnant et le plus extraordinaire, ne nous étonne pas” (§129)

Wittgenstein pose ici la question de l’émerveillement devant l'existence du monde.

 

“Notre erreur consiste à chercher une explication là où nous devrions voir les faits comme un phénomène primitif, c'est-à-dire là où nous devrions dire simplement : tel jeu de langage est joué” (§654)

 

Sur l'idée de phénomènes primitifs, Goethe écrit à Eckermann :

“Le point suprême où l'homme peut parvenir, c'est l'étonnement. Et lorsqu'il entre en étonnement devant le phénomène primitif, il faut qu'il se contente. Rien de plus haut ne peut lui être accordé et il ne doit pas chercher plus loin, c'est là la limite. Mais les hommes ne se contentent pas habituellement de contempler le phénomène primitif, ils pensent qu'il leur faut aller plus loin et ils sont semblables aux enfants qui, après s'être regardés dans un miroir, le retournent pour voir ce qu'il y a de l'autre côté”.

En somme, il faut apprendre à croire à la simplicité.

 

Le langage déguise la pensée, comme le vêtement déguise le corps : la forme extérieure du vêtement est coupée pour bien d'autres fins que celle de faire connaître la forme du corps.

 

 

═══════════════

 

 

 

Deuxième Wittgenstein : Les jeux de langage

 

 

Synthèse de l’idée de jeu de langage :

  Je fais cet ajout au livre de Pierre Hadot pour permettre de mieux comprendre l’idée de jeu de langage. Pour cette synthèse je me suis appuyé sur les travaux de Feyeraband et de différents auteurs dont je suis incapable de me souvenir.  j’ai effectivement l’habitude de prendre mes notes à la main, et il m’arrive parfois d’oublier de les référencer..

 

La signification correcte est dans l'usage, ce qui veut dire que l’on ne définit pas les mots en nous référant aux choses comme le veut l’idée commune.

Traditionnellement, on dit qu’un mot équivaut à une signification. Une signification a un caractère pur et défini. Pourtant dans l’usage, on remarque que la signification a un caractère hétérogène. C’est le cas du mot “lire” qui couvre toute une variété de phénomènes. Le mot “lire” ne renvoie pas à un seul objet. Donc on peut penser que pour trouver l’essence du mot “lire”, il nous faut retirer tout le particulier. Cependant, en faisant cela, nous ne trouvons pas l’essence du mot “lire”, nous trouvons seulement que tous les cas particuliers appartiennent à la famille des cas de lecture. Donc nous pouvons dire que nous employons le mot “lire” pour une famille de cas. Tous ces cas ont “un air de famille”, c’est-à-dire un réseau complexe de ressemblances et non une diversité axée sur un centre. Donc découvrir l’essence d’une chose à la manière dont on croit le faire habituellement est impossible.

Ce que nous appelons “descriptions”, sont des instruments visant à des usages particuliers. Le langage est un instrument, les concepts du langage sont des instruments. Donc il faut laisser l’emploi des mots nous enseigner leur signification.

C’est notre vouloir dire qui donne un sens à la phrase. Le vouloir dire relève du domaine psychique (Pour le détail de l’argumentation, voir “Les recherches philosophiques de Wittgenstein” par Paul K. Feyeraband).

 

Donc la signification est un usage car :

  1. Définir un mot au moyen d'autres mots nous engage nécessairement dans une régression à l'infini
  2. La définition ostensive (=expliquer un mot en désignant l'objet correspondant) n’est pas en mesure de tout définir, car comment montrer à quoi correspond un mot comme : “et”, “ou”, “mais”, “parce que”...?

 

Wittgenstein propose d'identifier la signification d'un mot à son usage. Cela implique un entrelacement nécessaire du langage avec les actions, la vie humaine.

Le sens d'un mot sera son utilisation dans un contexte. Il faut donc être attentif aux contextes et aux mots pour saisir le sens véritable.

Donc comprendre une phrase, c’est toujours comprendre un langage.

 

Quatre éléments clés des jeux de langage :

  1. Un jeu de langage est toujours complet, c’est un système autonome au sein de la langue
  2. Les règles font le jeu. Donc changer une règle ou la modifier équivaut à changer de jeu
  3. Il est impossible d'isoler une situation pure où un seul jeu unique se jouerait, différents jeux s'enchevêtrent dans la vie courante
  4. Il existe différents types de jeux

 

 

═══════════════

 

 

 Parler un langage fait partie d'une activité ou encore d'une forme de vie. Les jeux de langage constituent les limites infranchissables des propositions sensées.

On ne comprend pas le langage en soi, mais tel ou tel jeu de langage déterminé. Chaque jeu fonctionne selon ses modes et ses règles. Il n'y a donc pas de signification en soi, car “la signification d'un mot est son usage dans le langage” (§43).

Penser, c'est comme se parler à soi-même. On doit supposer déjà “le langage” quand nous voulons rendre compte du fait que notre langage a une signification.

“Etre dans un jeu de langage, c'est être dans une certaine attitude ou une certaine forme de vie” (§19).

Comprendre une proposition, ne consiste pas à se référer à une signification préexistante et connue directement par la “pensée”, il faut plutôt penser à une sorte de perception immédiate d'une structure :

“L'acte de comprendre une proposition du langage est beaucoup plus apparente que l'on ne croit à l'acte de comprendre un thème en musique” (§527).

Pour Wittgenstein, on ne peut pas réellement exprimer nos sensations, sentiments, états intérieurs. Il n'y a pas de langage privé, les différents jeux de langage se rapportent tous à une attitude et à une forme de vie collective. Le langage que nous employons pour nous parler à nous-mêmes n'est pas différent du langage collectif.

 

Dire sa souffrance, c'est jouer à un jeu de langage, c'est prendre une attitude qui n'a de sens que dans la société, pour appeler la sympathie, l'aide ou la compréhension.

“Avec mon discours, ma définition du moment, ma détermination actuelle, je suis entré dans l'ordre de l'impersonnel, c'est-à-dire sur la voie de l'universel” (Brice Parain “Recherches sur la nature et les fonctions du langage”).

 

Donc pour Wittgenstein, le jeu de langage, parce qu'il ne peut exprimer ma souffrance où ma sensation, en tant que personnel, n'est pas véritablement une expression ni la traduction d'une pensée.

L'objet intérieur est inexprimable.

 

“L'expression s'efface devant l'exprimé, et c'est pourquoi son rôle médiateur peut passer inaperçu. Cette certitude que nous avons d'atteindre, par-delà l'expression, une vérité séparable d'elle et dont elle ne soit que le vêtement et la manifestation contingente, c'est justement le langage qui l'a installé en nous” (Merleau-Ponty “phénoménologie de la perception” p.459)

 

Toute philosophie doit s'appuyer en dernière analyse sur des notions communes, qui ne semblent claires que dans la mesure où elles restent confuses et indéterminées.

 

Analogie langage thème musical :

La musique qui n’est le signe de rien, possède une puissance de signification qui lui est propre. Le langage lui-même possède cette puissance de signification propre, même si on ne peut l'analyser en idées distinctes correspondant à des objets distincts.

 

Les différentes langues constituent des systèmes qui prédéterminent les formes par lesquelles l'individu communique avec les autres, analyse le monde, en remarquant ou en négligeant tel ou tel aspect de l'univers, et finalement construit sa propre conscience de soi.

 

Avec la création de l'imprimerie, l’écrit prend le pas sur la parole, le langage philosophique n'est plus l'écho d'une parole vivante, il est destiné à être lu. On élimine les éléments rhétoriques et pédagogiques, les hésitations, les reprises du discours parlé, pour présenter les dogmes eux-mêmes.

Il ne s'agit plus de persuader un auditoire concret, mais l'auditoire universel, à savoir l'homme en soi. Il s’agit alors d’assurer les conditions d'une certitude absolue et donc d’une cohérence totale. Les philosophies deviennent des systèmes.

Cependant au-delà de la certitude et des systèmes, l'étonnement est toujours un nouveau point de départ :

“C'est dans la possibilité de la non-réponse que réside l'éminente possibilité philosophique du langage” (H. Wein)



 

 

L’activité de clarification

 

 

“Il faut commencer par l'erreur et lui substituer la vérité”, il ne suffit pas de constater la vérité.

Un homme abandonne un usage après avoir reconnu une erreur sur laquelle cet usage s'appuyait.

Toute explication est une hypothèse. L'explication, comparée à l'impression que fait sur nous ce qui est décrit, est trop incertaine : une explication hypothétique n'aide pas celui que l'amour tourmente.

L'activité de clarification doit être menée avec courage. Si l’activité de clarification n’est pas menée avec courage, elle devient un simple jeu astucieux.

“Le travail en philosophie, comme le travail en architecture, est à proprement parler davantage un travail sur soi-même, sur sa propre conception, sur la manière dont on voit les choses”.

“Le langage (les hommes sont profondément imbriqués dans les confusions philosophiques c'est-à-dire grammaticales) est devenu ce qu'il est, parce que les hommes avaient, et ont, une inclination à penser ainsi. C'est pourquoi l'arrachement ne se produit que chez ceux qui vivent dans une rébellion instinctive contre le langage. Non chez ceux qui, de tout leur instinct, vivent dans le troupeau, qui a créé ce langage comme étant son expression véritable”.

 

 

 

 

 

Video(s)

Photo(s)

Wittgenstein
witgenstein3
wittgenstein11
wittgenstein12
wittgenstein13
witgenstein1
Pierre Hadot
pierrehadot
hadot3
hadot2
Feyeraband
feyeraband1
feyeraband2
feyeraband3
feyeraband4